Le Yashica Minister D est un appareil photo 35 milimètres, télémétrique et à obturateur entièrement mécanique. Le D dans le nom indique en fait qu'il s'agit de la quatrième version de ce sympathique appareil (les précédents étaient pourtant appelés I, II et III, et non pas A, B et C...) Un télémétrique mécanique donc, en quelque sorte l'ancêtre de la famille des electro 35: on retrouve une conception commune, et le guide de réparation du Yashica electro 35 que l'on trouve sur l'excellent site de B. Suaudeau m'a d'ailleurs bien aidé dans les réparations qui vont suivre.
Voici donc mon exemplaire, trouvé sur une brocante bruxelloise en piteux état pour une poignée d'euros, avec son sac TP, son bouchon d'objectif d'origine et un filtre UV adapté:
Ses principales caractéristiques sont les suivantes:Notons au passage la façon peu commune de régler l'obturateur, on reporte une valeur lue sur la cellule (une valeur d'EV) sur la bague extérieure de l'objectif, ce qui a pour effet de coupler diaphragme et vitesse d'obturation sur l'ensemble des couples valables. Ensuite, on tourne la bague des vitesses, qui entraîne automatiquement la bague des diaphragme, et on sélectionne ainsi le couple désiré. Sur la photo ci-dessous, par exemple, on a fait une lecture de la valeur "11" (en rouge) sur la cellule, valeur qui a été reportée sur l'objectif, et le couple sélectionné est: 1/60, f:5.6.
Notons également que mon appareil possède encore l'étiquette du magasin, dont le numéro de téléphone est encore à 6 chiffres, ce qui a été abandonné en Belgique dans les année '70...
En plus de ces caractéristiques plutôt réjouissantes, mon exemplaire a souffert essentiellement de trois problèmes. D'abord, les mousses d'étanchéités de la chambre étaient à refaire, ce qui est très habituel pour un appareil de cet âge. Je ne traiterai pas ici du remplacement de ces mousses, cela a déjà été fait maintes fois. J'ai simplement suivi les indications données sur l'excellent site de Dirapon. J'ai utilisé des mousses de chez Aki Asahi: rapport qualité-prix imbattable ! Ensuite la cellule ne répondait plus (habituellement, la cause est à chercher du côté d'une pile qui a coulé et a oxydé prématurément un câble). Finalement, après une dizaines de vues sur une pellicule d'essai, l'obturateur a refusé de s'ouvrir (encore un problème classique sur les appareils de cet âge: d'anciens lubrifiants migrent de la mécanique de l'obturateur vers ses lames, et collent ces dernières entre elles). Je vous présente ci-dessous ce que j'ai fait pour résoudre ces deux problèmes et donner une seconde jeunesse à cet appareil.
Je ne suis pas réparateur professionnel d'appareils photos, et les indications qui vont suivre sont donc à prendre avec du recul. Je me contente de vous faire part de mon expérience avec le plus de précisions possibles, sans garantie aucune que ce soit la meilleure façon de procéder.
Au cas où vous tenez absolument à faire remettre en état un appareil, et que vous avez peur de le faire vous-même, sachez qu'il existe encore d'excellents réparateurs très compétents. Néanmoins, tout travail mérite salaire, et vous trouverez peut-être que le prix demandé, même s'il est juste, dépasse largement la valeur marchande de l'appareil. Je vous laisse seul juge...
Pour pouvoir enlever le capot chromé au sommet de l'appareil, il faut d'abord enlever la manivelle de rembobinage du film. Celle-ci est vissée directement dans l'axe qui commande la fourche de rembobinage dans la chambre noire (dévisser la vis que l'on voit en soulevant la manivelle ne sert à rien, cela sert seulement à désolidariser la manivelle de la couronne). On procède très aisément en ouvrant le dos, en glissant un tournevis dans la fourche de rembobinage pour l'empêcher de tourner, et en tournant la manivelle dans le sens anti-horaire:
Ensuite, il faut démonter le levier d'armement. Pour ce faire, il faut faire tourner la couronne qui le retient, en introduisant un outil dans les deux trous et en la faisant ainsi tourner. L'idéal est de disposer d'un outil spécial appelé spanner, ou à défaut (comme moi), d'une pince à bec très fin qui entre dans les trous.
Enfin, on dévisse les deux vis cruciformes qui se trouvent de part et d'autre du capot, près des anneaux d'attache des sangles. Il n'est pas nécessaire de demonter la molette de la cellule. À ce stade, on peut déposer le capot, qui reste néanmoins solidaire de l'appareil par trois câbles: une paire (rouge et noir) pour la cellule et un troisième (bleu) pour le bouton d'activation de cette dernière.
Remarquons qu'il n'y a qu'un fil qui va au bouton de la cellule, car le châssis de l'appareil fait le contact avec la masse de la pile. Autrement dit, on ne peut tester le bon fonctionnement de la cellule que quand le capot est posé sur l'appareil.
On peut maintenant procéder à un début de nettoyage. Mon exemplaire avait certainement appartenu à un estivant forcéné, car de nombreux grains de sables se trouvaient un peu partout à l'intérieur:
J'ai déposé le cadre contenant le verre dépoli en façade pour le nettoyer, et j'ai également retiré le cache de protection du télémètre, qui tient par deux points de colle (remplacés, lors du remontage, par des petits bouts de scotch):
Après avoir désoudé les fils de la cellule, pour plus de facilité de travail, j'ai également démonté la cellule elle-même, afin de pouvoir nettoyer le capot plus complètement (toujours ce sable...) On démonte la cellule en dévissant la bague qui la retient par devant l'appareil. Cette bague en métal est décorée d'un anneau en plastique noir qui s'est décollé chez moi. On le recolle facilement avec une colle néoprène:
Au point où j'en étais, j'ai également demonté la vitre dépolie de son cadre métallique, ainsi que le cadran de la cellule (toujours à l'aide de ma pince à bec fin), afin de tout nettoyer:
Afin de résoudre mon problème de cellule inactive, et étant donné que le câblage de la cellule au niveau du capot semblait correct, il fallait que j'accède au compartiment des piles pour trouver l'origine du problème. J'ai donc procédé à une démontage de la semelle, ce qui est très aisé, car il n'y a que deux vis à défaire:
Lors du démontage de la semellet, une petite pièce accompagnée d'une rondelle ne manqueront pas de sauter hors de l'appareil (on les voit dans le bas de la photo précédente). Cette pièce en forme de boomerang possède une protubérance qui est en fait le bouton d'ouverture du dos. Pour replacer cette pièce, emboitez le côté en forme de cédille dans la vis cuivrée (flèche verte sur la photo), et bloquez la pièce dans le crochet du petit ressort de rappel (flèche jaune):
Ensuite, j'ai démonté le compartiment de la pile, en dévissant les deux vis qui le retiennent au châssis:
Je décide donc de remplacer ce câble, qui est retenu au niveau du capot par une petite pièce de cuivre, qu'on peut ouvrir à l'aide d'une pince:
Ensuite, il est assez aisé de remplacer le câble qui pose problème. On peut se servir de l'ancien comme tire-fil pour guider le nouveau:
On effectue alors les deux soudures: une au dos du logement de la pile, et une autre à la cellule, et le problème est réglé ! Une fois le capot remis en place (et une pile insérée), on peut constater le retour à la vie de la cellule, qui donne d'ailleurs des indications fort exactes !
Malheureusement, mon euphorie sera de courte durée, car, après une dizaine de vues sur mon film d'essai, l'obturateur refuse obstinément de s'ouvrir, bien qu'il semble s'armer correctement. La première étape, pour accéder à l'obturateur, consiste à dévisser les deux groupes avant de l'objectif, qui sont retenus dans une pièce unique. Cette étape n'est pas simple, car l'avant de l'objectif offre peu de prise, et, sur un appareil un peu sale, cela peut s'avérer fort difficile. Par ailleurs, le pas de vis est très fin, et il faut faire une bonne dizaine de tours pour dévisser complètement la pièce. Dans mon cas, j'ai réussi, à la main, à faire faire un tour complet à la pièce, mais ensuite, elle s'est bloquée complètement. J'ai dû terminer à la pince, en prenant garde d'envelopper la partie en prise dans une feuille de caoutchouc pour ne pas (trop) abimer le métal qui est très tendre. J'avais pris soin de mettre un filtre en place pour éviter de trop déformer le pas de vis. A force d'efforts, on finit par y arriver:
Une fois cette pièce retirée, on peut séparer de l'obturateur la double bague chromée qui commande le diaphragme et la vitesse l'obturateur. Pour ce faire, il faut d'abord faire faire un demi-tour à une vis (flèche rouge) dont la tête est partiellement limée. Cela aura pour effet de libérer une colerette cuivrée (pointillés jaune) qu'on pourra dévisser. On peut alors enlever la bague chromée:
Pour un remontage plus aisé, il vaut mieux d'abord régler l'appareil sur une valeur extrème du diaphragme et de vitesse, et bien noter comment la came (flèche rouge ci-dessus) vient s'insérer au dos de cette bague pour assure la synchronisation avec les vitesses de l'obturateur.
On peut maintenant sortir le bloc obturateur en décollant précautionneusement la cuirette, ce qui fait apparaître 4 vis:
Une fois les vis dévissées, on sort le bloc obtu. Noter la synchronisation entre l'armement de l'obturateur et le boîtier: une came (flèche bleue) vient s'insérer dans une pièce (flèche orange) qui tourne quand on actionne le levier d'armement:
Le bloc obturateur vu de dos révèle: la synchronisation pour l'armement de l'obturateur (flèche bleue), le levier de déclenchement (flèche verte), le câble de la synchro flash, et un anneau circulaire (en pointillés rouges) qu'il faut dévisser pour séparer le couple obturateur/diaphragme à proprement parler de la rampe hélicoïdale de mise au point. Le résultat est montré sur la seconde image (à gauche la rampe de mise au point, à droite le bloc obturateur/diaphragme sur lequel est encore montée la lentille arrière).
Il reste à noter la présence d'un anneau (pointillés rouges - à ne pas perdre), à dévisser la lentille arrière et à désouder le câble de la synchro flash pour se retrouver avec bloc obturateur/diaphragme isolé de l'appareil.
Une fois ce bloc obturateur/diaphragme démonté, on peut procéder à son nettoyage. Une méthode populaire consiste à le faire tremper une nuit dans de l'essence C, ou essence à briquet. Cela aura pour effet de dissoudre les vieilles graisses. C'est cette méthode que j'ai appliquée, avec succès. Attention des réparateurs plus compétents que moi m'ont entretemps expliqué que cette méthode pouvait fonctionner à court terme, mais était dommageable pour l'obturateur à long terme, car celui-ci n'est maintenant plus lubrifié correctement ! Une réparation dans les règles de l'art consiste à déposer les lamelles de l'obturateur et du diaphragme, à tout relubrifier correctement... ce qui dépasse de loin mes capacités. Je réserve donc ce genre de traitements à des appareils, qui, comme celui-ci, ont une valeur marchande très faible (en l'occurrence, 15 euros dans une brocante). Pour mes appareils de meilleure qualité, je confie l'entretien à un professionnel. A chacun de choisir ce qui lui paraît le plus opportun.
Enfin, et après remontage, la touche finale a consisté pour moi à donner une seconde jeunesse au sac TP, à l'aide d'une peinture pour cuir noire en bombe.